La moindre des choses lorsque l'on arrive dans une ville que l'on connait à peine, c'est de se documenter un minimum sur les bons plans. Une traque sans fin, mais une chasse au plaisir toujours préoccupante. Car l'unique fois où Clyde s'était rendue à LA, c'était pour un stage en temps que secrétaire auprès d'un homme aussi borné qu'idiot. Elle n'y allait pas souvent, et passait ses journées à traîner dans les rues. Logique qu'elle connaisse le Viper, et ses nectars plus délicieux les uns que les autres.
Un haussement d'épaule, un sourire fugitif, et une voix simple et nue d'expression.
-Qui ne connait pas le Viper dans ce monde si ce n'est les ignares.
De nouveau une réponse crue. À croire qu'elle était d'humeur à cela. Clyde perdit le pli de bouche qui lui servait de sourire, pour reprendre un air sage qui lui était propre. Aller au Viper, jusque là, Shérie était d'accord. Ce n'est pas comme si elle était contre le fait d'aller prendre du bon -mauvais?- temps. Or, il était question de deux affaires à régler avant. Tout d'abord, les valises. Sachant que Clyde avait déjà oublié ce à quoi elle avait pensé il n'y a pas une minute, où déposer les bagages qui lui servaient de chaînes. Après une vaine tentative de motivation, elle se résolut de les laisser à l'aéroport. Cela devait être la solution la plus pratique -et, avouons-le, la moins fatiguante. Autre détail, un peu plus compliqué à résoudre cette fois. Shérie avait, plus ou moins, l'habitude du Viper. Disons qu'après y être allée tous les soirs pendant deux semaines, on s'y fait. Mais ces soirs-là, la miss était seule. Dans le cas présent, elle irait accompagnée. Différence de taille, car elle n'avait aucune idée de comment s'y prendre. Assez solitaire et accrochée à son indépendance, à croire qu'il lui fallait un mode d'emploi à côté d'elle si elle voulait s'en sortir à peu près. Il fallait apprendre la sociabilité rapidement, uniquement pour ne pas passer pour un être sans éducation face à un homme qu'elle ne connaissait qu'à peine. Qu'est-ce qui l'avait poussé à retenir Anthémius?
C'était trop tard, maintenant, et il fallait qu'elle assume ses choix bien que jamais rien ne soit vraiment terminé. Si la jeune femme le souhaitait, elle pourrait retirer sa proposition et attraper le premier taxi pour loin, très loin. Pourtant, un seul lien l'en empêchait. La politesse. Peut-être était-ce une qualité, ou alors un défaut. En tout cas, c'était bien encombrant et peu pratique. Que des avantages.
Observant ses valises -de plus en plus encombrantes- Clyde se rendit à l'évidence qu'il fallait retourner à l'aéroport pour tout poser. Chercher une chambre d'hôtel maintenant était quasiment peine perdue, et cela ne ferait qu'user du temps déjà précieux. Un soupir. De plus, avoir demandé au jeune homme de ne pas la vovoyer allait être difficile, et déjà quelques rires d'étourderies s'échappèrent. Du moment qu'Anthé ne demandait pas à Shérie d'arrêter de le vouvoyer, ça pourrait encore passé. Ensuite, ce serait le drame.
-Je crois que je dois retourner à l'intérieur, histoire de déposer tout cela... annonça-elle, en reprenant un leger sourire. Je suis désolée. Sincèrement.